Orateur
Description
Malgré leur nombre significatif entre le 15ème et le 19ème siècle et leur importance pour comprendre comment les techniques et connaissances astronomiques ont été transmises à l’empire ottoman, les taqwīm (almanachs - pronostiques) n’ont été que très peu étudiés d’un point de vue astrologique. Ma communication s’attachera à souligner, par quelques exemples, l'appropriation de la tradition astrale persane dans les taqwīm comme des éléments essentiels pour comprendre les dimensions scientifiques culturelles et politiques des pratiques astronomiques dans le cadre ottoman.
Ces productions annuelles réalisées autour de l’équinoxe de printemps sous la direction de l’astronome en chef de l’empire, le müneccimbaşı, sont composées d’un comparatif des calendriers en vigueur dans l’empire ottoman et ses voisins, d’informations agraires et médicales selon le déroulement l’année, des tables de coordonnées ou zīj utilisées, d'horoscopes, ou de manuels transmettant des principes astrologiques en persan et en turc ottoman. Mathématiciens, philosophes et versés dans les sciences traditionnelles, les müneccim étaient révérés et placé à des postes importants dans la hiérarchie dirigeante, sous l’autorité et avec l’oreille attentive du sultan. Ils étaient également encouragés, s’ils n’étaient pas eux-mêmes persans, à aller se former dans le vilāyat al-ʿAjam, le pays des iraniens.
Les trois zīj utilisés dans les taqwīm sont persans et timourides : les tables Ilkhanides (Zīj-iĪlkhānī) de Naṣīr al-Dīn Ṭūsī, les tables ilkhanides vérifiées (Zīj al-muḥaqqaq al-sulṭānī) de Shamsal-Dīn Muḥammad Wābkanawī (début 14ème siècle), et les tables d’Ulugh Beg (1393-1449) (Zīj-i Jadīd-i Gurgānī ou Zīj-i Ulugh Beg). Des taqwīms du 15ème siècle se réfèrent également expressément au travail de Abū al-Wafā al-Būzjānī (vers 940), mathématicien et astronome persan de la cour bouyide dont al-Bīrūnī était le contemporain. Ce sont également ces astronomes/ astrologues qui amélioreront les informations sur la position des planètes en démontrant les incohérences des indications de certains zīj avec les valeurs observées et calculées. Les münaccim du 15ème et 16ème siècle adopteront notamment les tables de Wābkanawī qui critiquait les zīj de Naṣīr al-Dīn Ṭūsī dans ses prédictions et son calcul de l’éclipse solaire du 30 Janvier 1283.